8 décembre : Immaculée Conception

3 décembre 2011

Lorsque Bernadette, le jeudi 25 mars 1858 (16e apparition), demande à la belle Dame quel est son nom, celle-ci lui répond dans le patois gascon que parle la jeune fille : « Que soy era Immaculada councepciou ».

Bernadette retient ces mots, qu’elle dit ne pas comprendre, et court les répéter au curé Peyramale, qui en est bouleversé : quatre ans plus tôt, le 8 décembre 1854, le pape Pie IX a fait de « l’Immaculée Conception de Marie » un dogme reconnu officiellement par l’Eglise catholique - mais Bernadette, qui n’a pas appris à lire, qui vit très isolée, qui appartient à une famille très humble, l’ignore, et rapporte les mots qu’elle a entendus sans savoir qu’ils désignent la Vierge.

Chacun interrogera sa foi devant des faits si troublants, mais en tous cas, chaque année, le 8 décembre, l’Eglise fête cette solennité de Marie Immaculée avec des lumières, des prières, des processions, qui sont une occasion privilégiée de célébrer la Mère de Dieu, notre « intercesseure » auprès du Christ…

Dans certaines villes, comme Lyon, une tradition très active suscite même des manifestations publiques très importantes, dont on reconnaîtra désormais le double visage, à la fois religieux et profane, dans la mesure où des foules considérables viennent regarder des illuminations, sans toujours se référer à la fête mariale.

Mais que savons-nous vraiment des « curieux » qui accourent pour admirer ces éclairages à effet artistique, ces projections de lumières sonorisées, ces milliers de bougies allumées sur les fenêtres partout dans la ville, scintillant toute la nuit jusqu’à la colline de Fourvières, haut-lieu de la chrétienté antique ? Quand bien même il n’y aurait là, simplement, pour certains, qu’un « folklore » attirant badauds et touristes, n’est-il pas beau de voir malgré tout combien cette tradition chrétienne de fêter les lumières en hommage à Marie a pu traverser le temps, et faire aujourd’hui encore battre les coeurs autour d’une « colline inspirée » ? Marie, mère discrète et délicate, est bien capable de faire monter aux lèvres d’un pèlerin le souvenir d’une prière d’enfance, de susciter ici un questionnement, de consoler ailleurs une solitude, de remplir de joie partout ceux qui sont venus vers son image illuminée « pour voir »… et s’en retourneront peut-être, ayant vu et ayant cru.

Souvent, par suite d’une confusion sur les termes, des chrétiens ont pensé que la formule « immaculée conception » désignait la conception divine de Jésus, par l’Esprit Saint, sans l’intervention humaine de Joseph, « père nourricier » de l’enfant ; en réalité, on le sait mieux aujourd’hui, à la suite de mises au point répétées, cette expression proclame en fait la conception « sans péché » de Marie elle-même, que la grâce de Dieu a préservée du péché originel, commun à toute l’humanité. Parce qu’elle est la mère du Sauveur, Marie naît « toute pure », exempte des conséquences de la faute initiale qui entraîne tout homme à commettre le Mal. Cette idée est très ancienne dans la piété populaire, et si elle a été formalisée par le pape au milieu du XIXe siècle seulement, on la trouve déjà en germe chez les pères de l’Eglise, et défendue par différents théologiens médiévaux, en particulier dans les milieux franciscains. La constitution dogmatique Lumen gentium de Vatican II précisera que Marie a été « rachetée de façon éminente en considération des mérites de son Fils » (LG 53).

Puissions-nous donc vivre cette fête simple et belle avec des coeurs d’enfants, nous réjouir de voir briller des sourires dans les ténèbres, et confier à Marie ce jour-là nos peines et nos faiblesses, pour qu’elle en fasse des étincelles de lumière, dans la grande espérance de l’Avent -


Simone Grava-Jouve