Devenir catholiques

13 janvier 2012

Dans quelques jours avec nos frères et nos soeurs de toutes les Églises, nous prierons pour l’unité des chrétiens.

Nous prierons pour notre unité « afin que le monde croie », selon la prière de Jésus devant ses disciples réunis, juste avant leur dispersion dans la nuit du jardin des Oliviers.
Nous prierons à partir de la souffrance de nous savoir séparés alors que, dans notre foi, nous nous croyons rassemblés par le même Seigneur, pour invoquer le même Père. Et notre prière sera d’autant plus fervente que nous serons conscients d’être encore et de multiples manières, des fauteurs de division ou, du moins, de donner à notre Église un visage tel que bien des gens ne peuvent pas s’y reconnaître, n’y trouvent pas leur place, ou la quittent.

Il est troublant, en effet, de constater combien de fidèles ont été amenés, un jour ou l’autre, à changer de confession parce qu’une autre Église – concrètement une autre communauté de frères et de soeurs –, leur convenait mieux pour vivre leur foi, que celle de leur baptême. Ce fait témoigne bien du chemin parcouru depuis nos guerres de religions
puisque la crainte et le mépris ont laissé place à la reconnaissance et au dialogue. Mais tout n’est pas équivalent et chaque communauté chrétienne est aussi une communauté humaine, où se retrouvent, bien plus qu’ailleurs puisqu’on y prie, la grandeur et la misère de l’homme : sa générosité qui le conduit à aimer Dieu et les autres, jusqu’au mépris de soi, et sa mesquinerie, son égoïsme, qui consiste à s’aimer soi-même, bien mal il est vrai, jusqu’au mépris de Dieu.

On reconnaît là ces « deux amours » qui, selon saint Augustin, sont au principe de la Cité de Dieu et de celle des hommes qui se passent de Dieu. Nous savons que, pour lui, l’Église ne se réduit pas à son aspect visible, institutionnel, même si elle ne peut éviter d’être une institution en ce monde sous peine de ne plus être. Elle est un mélange de bons et de mauvais dont le tri sera l’affaire de Dieu, et de Dieu seul, à la fin des temps, comme cela est très bien dit dans la parabole de l’ivraie et du bon grain.

Mais les hommes, dans leur impatience, ou seulement pour s’y retrouver, veulent faire le tri eux-mêmes et tout de suite, en se séparant de tout ce qui ne leur convient pas : ils veulent changer l’Église, à leur idée, au lieu de se changer eux-mêmes et de se convertir à la lumière de l’Évangile. Or cette Église dans laquelle il nous a été donné de naître par le baptême, et dans laquelle il nous est donné de vivre de l’amour qui vient de Dieu, ne nous a pas attendus pour naître.

C’est le Christ qui, mystérieusement, nous a choisis pour être les membres de ce Corps dont il est la Tête. C’est lui, le principe de notre unité, alors que nos « solutions », quand nous voulons les imposer, obtiennent le plus souvent l’effet contraire.
Cette unité dans la diversité, dans une multiplicité qui implique tous les hommes, c’est ce que dit précisément le mot « catholique », l’une des marques de l’Église dans le Symbole de Nicée-Constantinople, qui nous est commun, car plus ancien que le premier grand schisme entre Orient et Occident qui n’a fait que suivre un clivage déjà sensible dans l’empire romain, ne serait-ce qu’en raison de la langue. Or, de ce mot, l’Église romaine n’a pas le monopole : comme l’unité et la sainteté, la catholicité dit ce qu’est l’Église dans son mystère, telle qu’elle est née du côté du Christ sur le lit de la croix et telle qu’elle resplendira quand elle descendra du ciel à la fin des temps.

C’est pour qu’advienne pour nous, dans notre chair mortelle, cette Église immortelle, l’humanité par Dieu divinisée, que nous prions ensemble le Père, par le Fils et dans l’Esprit, pour qu’il la réalise en nous, et entre nous, selon son coeur.