1289/2022 - Dimanche 11 septembre 2022 - 24e Dimanche de l’Année
Édito du curé
Parmi les béatitudes, la plus connue et sans doute aussi la plus déroutante, est celle des pauvres et de la pauvreté. Heureux les pauvres ! Tout en étant convaincus que l’argent ne fait pas le bonheur, nos occupations et préoccupations laissent supposer, la plupart du temps, que nous sommes tous autant convaincus que l’argent y contribue toutefois grandement ! Au fond, cela n’est qu’une question de bon sens, voire d’évidence, il permet de vivre. Aussi, il peut nous paraître étrange et déroutant d’entendre Notre Seigneur faire l’éloge de la pauvreté, et par suite, imaginer que cet idéal-là n’est pas pour nous.
Or, cette béatitude est pour chacun d’entre-nous. Loin d’être un appel particulier et spécifique pour quelques âmes choisies, éprises d’héroïsme, elle est la voie essentielle et vitale de toute personne qui cherche Dieu en vérité.
En effet, la pauvreté, de cœur et d’âme, est la condition fondamentale et essentielle de toute créature. Nous recevons ce que nous sommes, et nos vies mêmes, de Dieu. Nous ne sommes pas maîtres du début de notre existence, ni de sa fin - même si certains ont l’illusion ou la prétention d’avoir ce pouvoir. Et dans le cours de nos vies, non seulement ce que nous sommes – notre apparence, notre caractère, notre culture – est un héritage de famille, mais encore dans notre quotidien, nous avons besoin des autres, de leur présence, de leur affection, de leurs compétences... Nous ne nous faisons pas seuls, nul d’entre- nous est une île coupée des autres et du monde. L’ermite lui-même, dans sa solitude, a besoin de Dieu qui est la raison de sa consécration, du monde pour lequel il prie, de la nature qui lui donne sa nourriture.
Heureux ceux qui découvrent qu’ils sont pauvres, qu’ils ont besoin de Dieu, qu’ils ont besoin du monde, qu’ils ont besoin des autres. En fait, cette pauvreté est la source d’une grande richesse parce qu’elle nous permet de découvrir ce que Dieu nous donne à travers chacun de nous. Oui, chacun de nous est un don de Dieu, un don par lequel notre Dieu manifeste sa présence, sa tendresse, la richesse de sa miséricorde.
Cette pauvreté est une richesse pour tout homme, et plus encore pour nous qui par le baptême sommes devenus membres l’Eglise, Corps du Christ. Ce qui est vrai de notre nature humaine, prend un sens et une dimension surnaturels par la grâce du baptême.
Dans la vie de nos communautés paroissiales, nous avons à découvrir cette pauvreté qui nous fait avoir besoin des autres, en nous libérant de tout orgueil, envie, jalousie ou prétention. Plutôt que de chercher à nous mettre égoïstement en valeur, en exaltant nos qualités, par la pauvreté contribuons à faire briller les qualités, mérites et vertus de notre prochain. Ainsi que le dirait saint Paul, il faut s’enorgueillir de nos faiblesses, afin que la grâce de Dieu se manifeste encore plus glorieusement.
Chacun de nous, de son côté, seul et isolé, n’est pas seulement pauvre mais démuni et vulnérable. Ensemble, riches de nos pauvretés, le regard fixé sur Jésus Christ, et plongé en son cœur, nous seront plus forts. Heureux les pauvres !
Abbé Bruno Gerthoux, curé