Homélie du Père Doumas

29 septembre 2021

Homélie du dimanche 26 septembre 2021.

Voilà un texte qui n’est pas évident ! Essayons d’en défaire les nœuds !

La difficulté vient de ce que la tradition évangélique, avant même que Marc ne rédige son évangile, a associé des paroles de Jésus - ce que les exégètes appellent des « logia »- et, que cette association est plus verbale que thématique. C’est ainsi que la parole : « Celui qui vous donnera un verre d’eau au nom de votre appartenance au Christ, amen, je vous le dis, il ne restera pas sans récompense » est une insertion, qui n’a rien à voir avec le contexte. Reprenons, donc, au début du texte et suivons le fil.

Jean, désigné comme « l’un des Douze », dit à Jésus qu’ils ont empêché quelqu’un d’expulser un démon en son nom, sous prétexte qu’il ne fait pas partie du groupe des disciples. Et Jésus répond qu’ils ont eu tort, car celui qui fait un miracle au nom de Jésus ne peut pas aussitôt après parler mal de Jésus. Et il généralise : « Celui qui n’est pas contre nous est pour nous ».

Cette formule, qu’on dira « inclusive », peut nous servir dans le commun de l’existence et faciliter bien des choses. Pourtant Jésus continue en parlant de « scandale », c’est à dire de chute. Et cela se développe en très sévères avertissements : « Celui qui est occasion de chute, mieux vaudrait pour lui qu’on lui attache au cou une de ces meules que tournent les ânes et qu’on le jette à la mer ! » Et, ensuite, il nous dit : coupe ta main, coupe ton pied, arrache ton œil … Bien sûr ce sont des images et on sait que Jésus aime les images. Mais, tout de même, c’est violent. Il faut comprendre cette véhémence de Jésus.

En fait, le « scandale » concerne les « petits qui croient » en Jésus. Le « scandale » signifie, donc, qu’on fait perdre la foi à quelqu’un de fragile dans la foi.

Il faut bien le reconnaître, certains sont forts dans la foi. Elle leur est chevillée au corps et on pourrait les torturer sans qu’ils renient. Cela a profondément marqué les premières communautés chrétiennes. On pense à saint Laurent ou à sainte Blandine. Mais, il y a, aussi, des faibles dans la foi. Ils croient, mais sans certitude et une contradiction peut les faire chuter. Cela peut être seulement un propos malheureux ou un comportement inapproprié.

A ce titre, les prêtres sont souvent causent de scandale. Il y a, bien sûr, les pédophiles, mais sans aller jusque-là bien des comportements du clergé choquent. Une parole mal venue à propos d’une situation matrimoniale ou à l’occasion d’un baptême peut avoir de graves conséquences. La personne, fragile dans la foi, est, littéralement, scandalisée et s’éloigne de l’Eglise. Parfois à tout jamais ! On peut souligner la disproportion entre la parole dite et la conséquence qu’on en tire. Il n’empêche, le résultat est là et c’est grave.

Certes il est difficile de savoir quel impact va avoir telle parole ou tel comportement. A ce propos, je raconte volontiers une anecdote qui concerne un prêtre du diocèse. Quelque temps après avoir célébré un mariage, il rencontre le couple pour lequel il avait célébré. Et ils lui disent : « Nous vous devons beaucoup. Ce que vous avez dit au cours de la célébration a été très important pour nous. » Le prêtre, plutôt content du compliment, demande alors : « Mais qu’est-ce que j’ai dit ? » Ils lui répondent : « Vous avez dit : il faut tourner la page. » Le prêtre réfléchit. Il n’y avait pas ça dans son sermon et du coup il est pris de doute. Mais, il avait bien prononcé la phrase. Simplement, il avait dit « il faut tourner la page », mais en parlant du carnet de chants !

Parole heureuse, même si elle n’était pas intentionnelle ! Mais, inversement, il y a beaucoup de paroles qui ne sont pas intentionnelles, mais qui sont malheureuses. Il faut faire très attention ! Nous devons être conscients de cela. Bien sûr dans le courant de la vie on ne peut pas surveiller chacune de nos paroles comme le lait sur le feu. Mais, dès qu’il s’agit de religion, dès que la foi chrétienne ou l’Eglise, sont en cause, il faut vraiment faire attention, très attention. Amen !