Je ne suis pas à la hauteur !

15 octobre 2022

Chaque fois que nous participons à la célébration du sacrifice eucharistique, avant de communier, nous redisons les paroles du soldat romain « Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir, mais dis seulement une parole et je serai guéri  ». Evidemment, nous ne sommes jamais à la hauteur du don de Dieu. Toutefois, le soldat romain ne reste pas bloqué sur son indignité, en effet, il affirme sa foi et son espérance. A cet égard, je me souviens d’une parole de Mgr Bouchex, disant en substance que nous ne sommes jamais à la hauteur, en mesure, de mériter l’Amour de Dieu. Il s’agit toujours d’un don surabondant et gratuit. Nous ne le gagnons pas comme un droit, nous le recevons toujours comme un don et une grâce.

Or, à cause de cela, nous pourrions penser que nous ne sommes pas à la hauteur du don qui nous est fait, et – sous couvert de modestie ou d’humilité – nous interdire de recevoir ce don, parce que nous jugeons et estimons que nous ne sommes pas à la hauteur. Assurément, c’est une perversion de l’humilité, pire encore, c’est un piège du démon qui par-là nous éloigne et nous sépare du don de Dieu et de sa grâce, nous enfermant et nous enchaînant à notre péché.

Ce qui est au cœur de notre foi, c’est précisément que ce Dieu Infini, Tout-Puissant et Créateur, se met à la hauteur de l’homme : depuis la Création, tout au long de l’histoire du Peuple de Dieu, jusqu’en la Rédemption par Notre Seigneur Jésus-Christ, et dans le temps que nous vivons, le temps de l’Eglise, notamment par les sacrements.

En créant l’homme et la femme, à son image et ressemblance, par amour, Il met dans le cœur de l’homme le désir de Dieu, la capacité non seulement de le connaître, mais aussi de l’aimer et d’espérer et désirer d’être aimé de Dieu. Tout au long de l’histoire du Salut, le Peuple de Dieu tout en faisant l’expérience de sa pauvreté, de son infidélité, de son ingratitude, découvre aussi le passage de Dieu et de sa grâce, et qu’Il intervient dans son histoire, dans son quotidien, jusqu’au cœur de son péché, pour le libérer, ainsi que le manifeste de manière marquante le Passage de la Mer-Rouge. Lorsque le Peuple est en marche, que ce soit au désert ou dans l’histoire et le temps, Dieu est avec lui. La Tente du Rendez-vous, le lieu de la présence et de la demeure de Dieu, est au milieu de son peuple. Dieu est là, malgré nos péchés, nos infidélités, nos ingratitudes !

Pour nous, « après avoir parlé de multiples manières par les prophètes » (cf. Hx), « Il nous parle par le Fils ». En se faisant homme, Dieu se fait petit enfant, vulnérable et caché. Par la Passion et la mort sur la Croix, il partage notre condition mortelle, et porte le poids de nos péchés. L’Amour infini qui se manifeste dans ces mystères, se livre encore, chaque jour dans le Sacrifice eucharistique. C’est le même Amour Infini qui là, donne sa vie dans la passion et la mort, et ici, se livre dans le sacrement de l’Eucharistie.

Evidemment, nous ne sommes pas à la hauteur ! Heureusement ! Et défendons-nous de prétendre être à la hauteur, de mériter le don de Dieu ! Mais n’ayons pas non plus l’orgueil de penser et prétendre que nos péchés sont plus forts que l’Amour Infini et Miséricordieux ! Tout nous conduit à prendre le temps, les moyens, par la vie de prière quotidienne et personnelle, par la participation au sacrifice de la Messe, par les sacrements, par l’adoration… à accueillir avec joie et enthousiasme le don de Dieu, un peu à la manière de Zachée qui descend en hâte de son arbre, lorsque le Seigneur lui dit « aujourd’hui, il faut que je vienne demeurer chez toi ».

C’est peut-être précisément parce que nous ne sommes pas à la hauteur, que c’est avec encore plus de joie, d’enthousiasme, de gratitude, que nous pouvons prendre du temps dans la prière et l’adoration, dans la célébration des sacrements, et laisser notre cœur déborder de charité.

 

Abbé Bruno Gerthoux, curé de Montfavet