La place de Marie dans l’Eglise

18 mai 2011

La place de la Vierge Marie dans l’Église et dans le dessein de Dieu, voilà un bon sujet de méditation pour ce mois de mai, et cela d’autant plus que, entre les catholiques eux-mêmes, les avis sont partagés, certains estimant qu’on n’en
fait jamais assez dans le sens de la dévotion, et d’autres, beaucoup trop.


Ce constat n’est pas de moi : on le trouve dans le guide de lecture ajouté à la fin de l’édition de poche du Catéchisme de l’Église catholique (Pocket, p. 906). Quant à la position de Jésus au sujet de sa mère, elle se trouve dans les Évangiles, et même par deux fois dans celui de Luc.
 
La première fois, chez les trois Synoptiques, le jour où « sa mère et ses frères ne pouvaient le rejoindre à cause de la foule ». À celui qui l’en avertissait, Jésus, tout en montrant ses disciples de la main, fit cette réponse : "Voici ma mère et mes frères ; quiconque fait la volonté de mon Père qui est aux cieux, c’est lui, mon frère, ma soeur, ma mère" (Mt 12, 46-
50).
 
La seconde fois, seulement chez Luc, lorsqu’une femme fit l’éloge de la mère qui l’avait « porté dans son ventre et nourri de ses mamelles », expression on ne peut plus réaliste de ce que peut représenter, comme faire-valoir, son enfant dans la vie d’une femme, alors que celui-ci, inévitablement, un jour, la quittera, ne serait-ce que pour faire sa vie. La
réponse de Jésus à cette femme si humaine, va dans le même sens que dans l’épisode précédent : « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui l’observent » (Lc 11, 28).
 
Or, cette écoute et cette observance de la volonté de Dieu, Jésus enfant n’avait pas manqué de les remarquer chez sa mère qui "retenait dans son coeur tous ces événements", que ce soit, nous dit Luc, lors de la visite des bergers (Lc 2, 19), alors qu’elle cherchait à comprendre ce qui se passait, ou, quand Jésus, à douze ans, resta perdu trois jours à Jérusalem (étrange annonce de sa mort !), avant de leur répondre, à elle et à Joseph, qu’il devait être aux affaires de son Père (Lc 2, 51).

Ce que nous dit Jésus adulte au sujet de sa mère nous révèle en la vraie grandeur, elle dont nous savons, par l’Évangile de Jean, que, du haut de sa croix, alors que mouraient avec lui tous les rêves d’un messianisme terrestre, Jésus nous l’a donnée pour mère en la personne du « disciple qu’il aimait » (Jn 19, 26-27).
Cette grandeur se trouve merveilleusement dite par saint Augustin, cité dans la Liturgie des heures pour la fête de sa Présentation (21 novembre) : « Il est plus important pour Marie d’avoir été disciple du Christ que d’avoir été mère du Christ ». En effet, « son âme a gardé la vérité plus que son sein n’a gardé la chair ». Et Augustin de continuer : "Sainte Marie, heureuse Marie ! Et pourtant l’Église vaut mieux que la Vierge Marie. Pourquoi ? Parce que Marie est une partie de l’Église, un membre éminent, un membre supérieur aux autres, mais enfin un membre du corps entier".

On ne méditera jamais assez le mystère de l’Incarnation, concentré dans le corps et le coeur de Marie, elle qui, Mère de Dieu, enfanta son propre Créateur ! Voilà qui est proprement inconcevable selon notre logique de l’avant et de l’après ! Et pourtant, selon notre foi, Jésus est vrai Dieu et
vrai homme.
Mais Dieu n’est pas limité par notre temps et, depuis qu’elle a été emportée tout entière auprès de lui, Marie est désormais dans le temps de Dieu, un temps qui enveloppe le nôtre et qui, pour peu que nous lui prêtions attention dans la prière, nous est présent en tout moment et en tout lieu. Telle est la toute-puissance de Dieu, qui n’a rien à voir avec celle dont nous pouvons rêver mais qui est toujours condamnée à se briser contre une autre puissance. La sienne est permanente, sans autre limite toutefois que celle que nous pouvons lui opposer, et, d’où que nous soyons, elle nous éveille et nous libère pour nous rendre capables d’aimer selon son coeur et en vérité. C’est ainsi qu’il opère des miracles, prolongements de sa propre Incarnation.

La fonction de Marie dans l’Église dont elle est le type, la réalisation parfaite, de l’Église comme Corps du Christ et communion des saints ? Celle de nous enfanter sans cesse à cette vie de Dieu – ce qui, à la différence de notre naissance terrestre, ne peut se faire sans notre propre
volonté, ni notre propre conversion –, maintenant et à l’heure de notre mort.