Pour les vingt-huit derniers chrétiens de Homs

10 avril 2014

Lundi 7 avril, le père Frans Van der Lugt, jésuite, était assassiné à Homs. Un mois auparavant, il avait avait alerté l’opinion internationale sur la situation des habitants de cette ville, et particulièrement les chrétiens - appel relayé par Simone Grava Jouve, dont nous publions l’éditorial du 9 mars, et l’intention de prière.


En ce 1er dimanche de Carême, je voudrais faire monter vers Dieu notre Père une prière très respectueuse et très insistante pour nos frères de Syrie, et particulièrement pour les vingt-huit derniers chrétiens résidant à Homs. Nous avons appris le 21 février dernier, officiellement, qu’il ne reste plus que 28 chrétiens dans la partie historique la vieille ville, où ils étaient 60000 avant le début des combats. Depuis un an, Homs est aux mains des rebelles et encerclée par les troupes gouvernementales. Les derniers chrétiens présents, menacés de toutes parts, souffrent de la faim et ne veulent pas quitter leur quartier de peur de voir leurs maisons détruites, leurs biens pillés et réduits en cendres. Le Jésuite néerlandais Franz van der Lugt, installé dans la ville de Homs depuis plus de quarante ans, témoigne : « Autour de moi, presque toutes les maisons sont détruites. Les gens meurent de faim, ils errent dans les rues à la recherche de nourriture pour leurs enfants ; ils sont à bout de force, leur peau a pris une couleur de cire… Le matin, nous mangeons des olives et buvons du thé, et le soir, nous essayons de faire une soupe avec la verdure qui pousse entre les pavés des rues ».

Le père van der Lugt ne veut pas partir lui non plus ; il sait que s’il quitte son couvent, le bâtiment sera détruit. « Je suis là pour tous les Syriens, dit-il. Même si les 28 chrétiens partaient, je resterais ». Il lance un grand cri de détresse à l’intention des medias de la communauté internationale : « Nous voulons vivre ! Nous ne voulons pas mourir de faim dans d’atroces souffrances ! Le plus grand danger qui nous guette, c’est le désespoir. Je dois garder espoir si je veux être encore utile autour de moi ! »


Qui a répercuté ce cri ? Personne, ou presque ; « la Croix », très modestement. De quoi donc était faite l’actualité tous ces temps derniers ? Des événements d’Ukraine, certes, mais aussi de jeux sportifs, de récompenses d’acteurs, de rumeurs politiques… Et dans le grand silence d’indifférence vis-à-vis de leur drame, nos frères d’Homs meurent de faim, privés de tout, abreuvés de chagrin, de peur, de doute peut-être. Ne les abandonnons pas, ne les oublions pas ! Que notre carême soit habité de leur résistance, que chacun d’eux ait en nous un nom secret, comme un ami, un nom que Dieu reconnaîtra, un nom de saint, de martyr. Eglise à l’agonie qui bat encore dans 28 cœurs d’hommes, Homs est pris en étau entre des forces qui l’écrasent, et le Christ couronné d’épines y marche sans doute au milieu des bombes, parmi les ruines, pleurant.


Simone Grava-Jouve
9 mars 2014