Serviteur de la mission du Christ

3 octobre 2022

 Elle est étrange cette image d’un grand arbre d’abord déraciné et qui irait ensuite se planter dans la mer. Cela parait bien difficile : l’eau de mer n’est guère propice à la croissance des arbres de la terre. Dans la symbolique biblique, la mer représente le lieu de la mort, le lieu où l’homme peut disparaître : pendant la tempête sur le lac de Galilée, les Apôtres crurent périr. Cette image de planter un arbre dans la mer, de croire qu’une croissance est possible à travers les eaux de la mort, voilà une image par laquelle Jésus parle à ses disciples : il leur parle de renaissance pascale, il leur annonce le chemin qui sera le sien lorsque, submergé par les eaux de la mort, il sera tiré de la mort à la vie par son Père. 

 Les arbres dans la mer, c’est nous, affrontés aux malheurs dans nos vies et à la mort, et confiés dans la foi au Père des cieux. Voilà la foi de Jésus : rien n’est impossible à Dieu, un arbre déraciné par la violence des hommes peut être planté par Dieu dans la terre des vivants. Voilà le contenu de notre foi, voilà ce que nous avons de précieux à partager. 

 Cette foi, nous l’avons reçue : quelqu’un dans l’humanité nous l’a annoncée, l’Esprit Saint en a témoigné en notre coeur. Et, dans notre liberté, nous avons accueilli ces témoins. Sans ces hommes et ces femmes pour lesquels nous avons une profonde reconnaissance et qui ont été pour nous des serviteurs de l’Évangile par le témoignage de leur vie et de leur parole, nous ne connaîtrions pas le Nom de Jésus, nous l’aurions peut-être oublié. Ces témoins ont été précédés par les disciples et les martyrs. Précédés aussi par l’Esprit Saint qui est le serviteur de la Parole de Jésus pour nous la rappeler et nous la faire comprendre au fond de nos cœurs. Lui, l’Esprit Saint, est le premier Serviteur de la mission du Christ. 

 Nous aussi, à la suite de ces témoins et appuyés sur l’Esprit Saint, nous sommes appelés à devenir des serviteurs de la mission du Christ « pour » d’autres, pour que d’autres vivent et soient heureux. D’autres qui, comme nous, sont dans la mer : malade d’un cancer, tristes d’une vie qu’ils n’ont pas choisie, s’interrogeant sur le sens de la vie, au chômage… autant de situations où ils sont submergés par les eaux de la mort, se demandant comment ils vont bien pouvoir tenir, entendant monter en eux cette question : « Qui nous fera voir le bonheur ? » C’est de connaître le mystère du Christ et de reconnaître la bénédiction de Dieu qui peut les faire passer, par grâce, de la question « Qui nous fera voir le bonheur ? », à la foi de Jésus sur la croix : « Père, je remets ma vie entre tes mains ! » Car c’est la foi qui permet de se faire « simple serviteur » au point de consentir à l’enseignement de Jésus : « Nous sommes de simples serviteurs : nous n’avons fait que notre devoir. » Demandons et écoutons au fond de nous comment l’Esprit Saint nous appelle, chacun à notre manière, à devenir des serviteurs de la mission du Christ aujourd’hui.

Abbé Frédéric Fermanel