Tous unis d’un même cœur
Les disciples qui avaient été affligés par la mort du Seigneur Jésus sur la Croix, apeurés face aux menaces, inquiets pour leur propre vie et sécurité, comme abandonnés et isolés, changèrent d’attitude après l’Ascension. En effet, saint Luc précise « qu’ils s’en retournèrent à Jérusalem en grande joie, et ils étaient constamment dans le Temple à louer Dieu » (Lc 24, 52-53). Ils n’ont plus peur, ils ne se cachent plus, ils ne sont plus seuls, ils sont dans la joie et celle-ci déborde en prière et en louange. Les Actes des Apôtres notent « tous d’un même cœur étaient assidus à la prière, avec quelques femmes, dont Marie mère de Jésus, et avec ses frères » (Ac. 1, 14).
Après l’Ascension et dans l’attente de recevoir le don de l’Esprit-Saint, le premier fruit qui se manifeste est le fait pour les disciples, pour ces chrétiens, de s’assembler. Ils ont conscience que les enseignements reçus, les signes dont ils ont été témoins, les événements qu’ils ont partagés avec le Seigneur Jésus, et même les épreuves, tout cela, ils l’ont vécu ensemble, et c’est ensemble qu’ils peuvent en porter non seulement le souvenir, mais en garder, conserver et affermir la grâce. Ils ont compris que tout n’était pas fini, que ce qui avait été annoncé et accompli par la vie et les paroles du Seigneur Jésus continuait à vivre et porter du fruit.
Cette union des cœurs, qui est la substance de la vie même de l’Eglise, c’est-à-dire de la communauté des chrétiens, des baptisés, se nourrit et s’exprime dans l’assiduité à la prière. Bien sûr, cette assiduité est d’abord sensible et tangible, elle est une réalité qui prend de la place dans leur vie, qui qualifie leur vie. La prière n’est pas un accessoire facultatif de leur vie, elle en est le cœur. Plus encore et indissociablement, elle est une fidélité de cœur et d’âme. La fidélité est un acte de foi, elle est la foi en acte, et cet acte, c’est la prière qui unit par amour et dans l’amour l’âme à Dieu. Cette union à Dieu est la source de la joie, parce qu’elle est l’expérience de sa présence, de son amour et de sa grâce.
La présence spécifique de Marie, « mère de Jésus », au sein de cette assemblée, n’est pas anodine. La présence de « Marie, mère de Jésus » est le signe que cette assemblée, c’est l’Eglise. Elle en est la garantie, le signe et l’instrument, parce qu’elle reçoit de Jésus ce qu’elle est, elle donne Jésus par la grâce, elle conduit à Lui par son enseignement et sa parole, comme le fait l’Eglise pour toute créature. C’est pour cela qu’au lendemain de la Pentecôte, la Vierge-Marie est vénérée sous son titre de Mère de l’Eglise.
Cette première communauté chrétienne nous indique le chemin à suivre pour toute communauté chrétienne, pour notre propre communauté chrétienne, si nous la voulons fidèle au Christ Jésus. Les épreuves et difficultés du temps, celles que nous vivons personnellement, voire nos différences ne doivent pas être un obstacle à notre vie chrétienne, mais au contraire nous conduire à demeurer unis d’un même cœur. Ensemble, nous devons être témoins les uns les autres, mais aussi les uns pour les autres de l’œuvre de la grâce dans nos vies, si nous voulons être capables d’être des témoins crédibles pour le monde. C’est dans l’assiduité, persévérance et fidélité à la prière commune, en particulier dans la célébration du culte public à la messe, que nous prendrons les moyens de laisser grandir notre joie. Plus qu’une association, l’Eglise est une famille qui a Marie pour Mère.
Abbé Bruno Gerthoux, curé