Une charité sans limite et sans borne

6 novembre 2022

La première chapelle-nord de l’église de Notre-Dame-de-Bon-Repos, à côté du sanctuaire, est ornée d’un tableau qui représente la Remise du Rosaire à saint Dominique. En arrière-plan, une scène des âmes du Purgatoire. Les personnages sont représentées les bras levés en signe de prière et d’espérance, secourues par un ange qui porte les fruits de la prière du rosaire et vient les tirer des flammes. Le mot de Purgatoire – et sa représentation - peut nous étonner ou nous surprendre ! Sans doute aura-t-il mal vieilli avec le temps ! Cependant, cela ne doit pas nous faire ignorer ou mépriser la réalité que le mot désigne.

Au moment de notre mort, du passage de cette vie à la vie éternelle, deux solutions se présentent : soit nous sommes sauvés, et nous sommes avec Dieu ; soit nous sommes damnés, et nous nous retrouvons dans la même situation que les ange déchus, séparés de Dieu, seuls et isolés. La souffrance des damnés est précisément d’être séparés de Dieu, dans une solitude et un isolement sans issue, sans perspective, sans fécondité. La béatitude et le bonheur de ceux qui sont sauvés, à l’inverse, est d’être avec Dieu, en son amour et tendresse, et d’avoir la joie de n’y être ni seuls ni isolés, mais avec tous ceux qui sont sauvés.

Alors, qu’en est-il des défunts qui sont au Purgatoire ? Ils sont sauvés ! Mais alors, que représentent les flammes au milieu desquels ils se trouvent ? Il ne s’agit pas de flammes de l’Enfer qui détruisent, mais bien plutôt d’une représentation du feu de l’Amour de Dieu.

En effet, au moment de notre mort, si le cours de notre vie terrestre est achevé, d’une certaine manière nous demeurons encore attachés à cette terre par ce que nous avons fait et entrepris, par ce que nous y avons laissé ; et cela est vrai aussi par le souvenir et l’affection nos proches. C’est encore plus vrai pour les conséquences de nos péchés dans le temps. Même si nous avons été pardonnés des conséquences éternelles de nos péchés - c’est-à-dire la séparation d’avec Dieu - si nous sommes rétablis dans son amour et amitié, les conséquences matérielles de nos péchés demeurent, et doivent être réparées. Il reste comme un obstacle dans nos cœurs qui nous empêche d’être tout à Dieu, comblés de son amour. Et les âmes des fidèles défunts attendent avec ferveur, espérance, confiance d’être comblées de cet amour, elles brûlent de ce désir, de cette attente qui ne peut être encore complète.

Par nos prières, nos actes de pénitences et de charité, nous pouvons aider les âmes des fidèles défunts, offrir pour eux ces prières, pénitences et actes de charité, et ainsi contribuer à « réparer » et « purger » les conséquences mauvaises de leurs péchés dans le temps et l’histoire. De la même manière qu’en ce temps, nous pouvons venir au secours de la faiblesse des plus pauvres concrètement, poussés par la charité, de la même manière, parce que cet amour et cette charité n’ont pas de limite, nous pouvons continuer à venir au secours de ceux qui ont quitté cette vie. En faisant le bien à leur place, nous contribuons, selon les paroles de saint François d’Assise, « Là où est l’offense, que je mette le pardon. Là où est la discorde, que je mette l’union. Là où est l’erreur, que je mette la vérité. Là où est le doute, que je mette la foi. Là où est le désespoir, que je mette l’espérance. Là où sont les ténèbres, que je mette la lumière. Là où est la tristesse, que je mette la joie ». Par suite, cette charité envers les fidèles défunts, est un acte de foi et d’espérance formidable, qui affirme la puissance de l’Amour et de la Vie sur la mort.

Abbé Bruno Gerthoux, curé de Montfavet