Chers frères prêtres et diacres, chers frères et sœurs en Christ,
Je suis heureux de vous adresser mes vœux fraternels en ce début d’année et à l’aube du grand jubilé de la Miséricorde. Ma pensée et ma gratitude vont à vous tous et à vos proches.
Pour formuler mes vœux je m’inspirerai de ceux que le Saint Père a adressés il y a quelques jours à l’ensemble de ses collaborateurs, car lui-même a dit qu’à travers ses vœux, il s’adressait aussi aux différentes Églises, aux paroisses et aux communautés religieuses.
Je commencerai par souligner l’efficacité du service pastoral qu’avec effort, avec responsabilité, avec engagement et dévouement, vous rendez au service de notre Église diocésaine, et cela est pour moi une vraie consolation.
Ce serait une grande injustice de ma part de ne pas exprimer ma vive gratitude et mes encouragements à toutes les personnes qui travaillent avec dévouement, dévotion, fidélité et professionnalisme, offrant à notre Église diocésaine le réconfort de leur solidarité et de leur obéissance ainsi que de leurs prières généreuses.
Je voudrais revenir à l’essentiel et vous partager un “catalogue des vertus nécessaires” pour vivre cette année dans la lumière de la miséricorde
1. Être missionnaire à la manière du Bon Pasteur : Le caractère missionnaire est ce qui donne à l’Église sa fécondité ; il est la preuve de sa vigueur, de l’efficacité et de l’authenticité de son action. La foi est un don, mais la mesure de notre foi se prouve par notre capacité à la communiquer. Chaque baptisé est missionnaire de la Bonne Nouvelle avant tout par sa vie, par son travail et par son témoignage joyeux et convaincu. C’est l’engagement quotidien à vivre à la manière et à la suite du Bon Pasteur qui prend soin de ses brebis et donne sa vie pour sauver la vie des autres.
2. Être disponible mais lucide : La disponibilité et la lucidité nous demandent à agir avec intelligence et intuition, à avoir la rapidité d’esprit à comprendre et à affronter toute situation avec sagesse et créativité. Nous devons agir selon le célèbre dicton : “Tout faire comme si Dieu n’existait pas et, ensuite, laisser tout à Dieu comme si je n’existais pas”.
3. Être spirituel mais humain. La vie spirituelle est la colonne vertébrale de tout service dans l’Église et dans la vie chrétienne. Elle est ce qui nourrit toute notre conduite, la soutient et la protège de la fragilité humaine et des tentations quotidiennes. L’humanité est ce qui incarne la vérité de notre foi. Celui qui renonce à son humanité renonce à tout. L’humanité est ce qui nous rend différents des machines et des robots qui n’entendent pas et ne s’émeuvent pas. Quand il nous est difficile de pleurer sincèrement ou de rire franchement, alors notre déclin a commencé. L’humanité c’est savoir montrer tendresse et familiarité, courtoisie avec tous (cf. Ph 4, 5). Spiritualité et humanité, tout en étant des qualités innées, sont toutefois des potentialités à réaliser entièrement, à déployer continuellement et à manifester quotidiennement.
4. Être exemplaire et fidèle : Exemplarité pour éviter les scandales qui blessent les âmes et menacent la crédibilité de notre témoignage. Fidélité à notre consécration, à notre vocation, se rappelant toujours les paroles du Christ : “Qui est fidèle en très peu de chose est fidèle aussi en beaucoup, et qui est malhonnête en très peu est malhonnête aussi en beaucoup” (Lc 16, 10). Et « Mais si quelqu’un doit scandaliser l’un de ces petits qui croient en moi, il serait préférable pour lui de se voir suspendre autour du cou une de ces meules que tournent les ânes et d’être englouti en pleine mer. Malheur au monde à cause des scandales ! Il est fatal, certes, qu’il arrive des scandales, mais malheur à l’homme par qui le scandale arrive ! » (Mt 18, 6-7).
5. Être raisonnable mais aimable : La rationalité sert à éviter les excès émotifs et l’amabilité à éviter les excès d’une bureaucratie canonique outrancière. Ce sont des talents nécessaires pour l’équilibre de toute personnalité. Tout excès est l’indice de quelque déséquilibre, aussi bien l’excès de rationalité que d’amabilité.
6. Être prudent mais déterminé : La prudence dans le jugement nous rend capables de nous abstenir d’actions impulsives et précipitées. C’est la capacité à faire émerger le meilleur de nous-mêmes, des autres et des situations en agissant avec attention et compréhension. C’est faire aux autres ce que tu voudrais qu’il te soit fait (cf. Mt 7, 12 et Lc 6, 31). La détermination c’est agir avec une volonté résolue, avec une vision claire, dans l’obéissance, et seulement pour la loi suprême du salut des âmes.
7. Être dans la Charité mais aussi dans la vérité : Deux vertus indissociables de l’existence chrétienne : « Faire la vérité dans la charité et vivre la charité dans la vérité » (cf. Ep 4, 15) ; au point que charité sans vérité devient idéologie destructrice du “tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil” mais la vérité sans la charité devient justice aveugle.
8. Être honnête et mature : L’honnêteté est le fait d’agir dans une sincérité absolue avec soi-même et avec Dieu. Celui qui est honnête n’agit pas avec droiture seulement sous le regard du supérieur ; celui qui est honnête ne craint pas d’être surpris, parce qu’il ne trompe jamais celui qui lui fait confiance. Celui qui est honnête ne se comporte jamais en maître sur les personnes ou sur les choses qui lui ont été confiées à administrer, comme le “mauvais serviteur” (Mt 24, 48). L’honnêteté est la base sur laquelle s’appuient toutes les autres qualités. La maturité vise à atteindre l’harmonie entre nos capacités physiques, psychiques et spirituelles. Elle est le but et l’aboutissement d’un processus de développement qui ne finit jamais et qui ne dépend pas de l’âge que nous avons.
9. Être déférent et humble : La déférence est le talent des personnes qui cherchent toujours à montrer un respect authentique envers les autres, envers leur propre rôle, envers les supérieurs, les subordonnés, les dossiers, les papiers, le secret et la confidentialité ; les personnes qui savent écouter attentivement et parler poliment. L’humilité, de son côté, est la vertu des saints et des personnes remplies de Dieu qui, plus elles acquièrent de l’importance, plus grandit en elles la conscience de n’être rien et de ne rien pouvoir faire sans la grâce de Dieu (cf. Jn 15, 8).
10. Être généreux et attentif : Plus nous avons confiance en Dieu et dans sa providence, plus nous sommes généreux d’âme et plus nous sommes ouverts à donner, sachant que plus on donne plus on reçoit. En réalité il est inutile d’ouvrir toutes les Portes Saintes de toutes les basiliques du monde si la porte de notre cœur est fermée à l’amour, si nos mains sont fermées à donner, si nos maisons sont fermées à héberger, si nos églises sont fermées à accueillir. L’attention, c’est soigner les détails et offrir le meilleur de nous-mêmes, et ne jamais baisser la garde sur nos vices et nos manques. Saint Vincent de Paul priait ainsi : “Seigneur, aide-moi à m’apercevoir tout de suite de ceux qui sont à côté de moi, de ceux qui sont inquiets et désorientés, de ceux qui souffrent sans le montrer, de ceux qui se sentent isolés sans le vouloir”.
11. Être calme et audacieux : Être calme signifie ne pas se laisser effrayer face aux difficultés comme Daniel dans la fosse aux lions, comme David face à Goliath ; cela signifie agir avec audace et détermination mais sans tiédeur « comme un bon soldat » (2 Tm 2, 3-4) ; cela signifie savoir faire le premier pas sans tergiverser, comme Abraham et comme Marie. De son côté, l’audace, c’est savoir agir avec liberté sans s’attacher aux choses matérielles provisoires. Le Psaume dit : « Aux richesses quand elles s’accroissent n’attachez pas votre cœur » (61, 11). Être audacieux veut dire être toujours en chemin, sans jamais s’alourdir en accumulant des choses inutiles ou en se fermant sur ses propres projets et sans se laisser dominer par l’ambition.
12. Et finalement être fiable et sobre : Celui qui est fiable est celui qui sait maintenir ses engagements avec sérieux quand il est observé mais surtout quand il se trouve seul ; c’est celui qui répand autour de lui un climat de paix parce qu’il ne trahit jamais la confiance qui lui a été accordée. La sobriété – dernière vertu de cette liste, mais pas en importance – est la capacité de renoncer au superflu et de résister à la logique consumériste dominante. La sobriété consiste à regarder le monde avec les yeux de Dieu, avec le regard des pauvres et de la part des pauvres. La sobriété est un style de vie, qui indique le primat de l’autre comme principe hiérarchique et exprime l’existence comme empressement et service envers les autres.
Pour conclure, la miséricorde n’est pas un sentiment passager, mais elle est la synthèse de la Bonne Nouvelle, elle est le choix de celui qui veut avoir les sentiments du “Cœur de Jésus”, de celui qui veut suivre sérieusement le Seigneur qui nous demande : “Soyez miséricordieux comme votre Père” (Lc 6, 36 ; cf. Mt 5, 48).
Que la miséricorde guide nos pas, éclaire nos décisions. Qu’elle soit la colonne vertébrale de notre action. Qu’elle nous enseigne quand nous devons avancer et quand nous devons faire un pas en arrière. Qu’elle nous fasse lire la petitesse de nos actions dans le grand projet de salut de Dieu et dans la majesté et le mystère de son œuvre.
Amen