Sixième d’une famille de sept enfants, dont trois prêtres, le Père Hubert Lelièvre a été ordonné prêtre le 7 octobre 1989. En 1995, nommé aumônier de l’hôpital romain pour les malades du sida en phase terminale, il fonde en même temps ce qui deviendra la "Famille Missionnaire l\\\’Evangile de la Vie" (32, Cours de la République - 84500 Bollène - France) : une réponse à l’appel lancé par Jean Paul II : "Une grande prière pour la Vie qui parcourt le monde entier est une urgence". (Evanglium Vitae, 100). Aujourd’hui, le Père Lelièvre poursuit sa mission au service de la vie et de la famille à Bollène, à la demande de Mgr Cattenoz.
Zenit - Père Lelièvre, vous diffusez sur internet une "carte de France" des veillées pour la vie du 27 novembre : que représente cette carte ?
Cette carte donne les lieux où se déroulera la Veillée de prière pour toute vie naissante, demandée par le Saint-Père. A ce jour, il y a plus de 250 Veillées annoncées en France, dans les Dom-Tom, sans oublier les terrains où nos soldats sont en mission à travers le monde. C’est la partie visible de cette carte. Plus largement cette carte montre que quelque chose bouge en profondeur, en France.
Zenit - Il y a une carte invisible ?
Une double carte invisible : D’abord, je pense aux Abbayes, Monastères, Couvents qui prieront en profonde communion avec le Saint-Père. Mais aussi, et ce n’est pas sans émotion, je pense aux innombrables malades dans nos hôpitaux et cliniques : chaque chambre d’hôpital est un sanctuaire, chaque lit d’hôpital est un autel où la souffrance, unie à celles de Jésus, sauve les âmes. Un vrai paratonnerre !
Ensuite, à travers cette grande prière urgente qui traversera le monde entier, comment ne pas rejoindre et envelopper de notre prière et de notre affection chaque enfant conçu ce 27 novembre ; comme chaque enfant qui se trouve actuellement dans le sein de sa maman, qui prépare son premier sourire pour dire un "Merci" pour la vie reçue, donnée ! Comment ne pas envelopper de notre prière, de notre affection, les mamans qui attendent un enfant ; là où l’enfant tarde à venir. Comment ne pas crier vers le Ciel pour tant de femmes enceintes trop souvent seules, abandonnées, isolées où la grossesse rime trop souvent avec détresse. Comment ne pas pleurer avec ces millions de Rachel qui pleurent, parce que l’enfant n’est plus là : il a été supprimé par l’avortement. Comment ne pas soutenir et accompagner par nos prières le personnel médical, de plus en plus habité par le désir de respecter la vie dans toutes ses étapes, dès sa conception. Comment ne pas encourager les législateurs à "choisir la vie" (cf. Dt 30.16.19-20) pour notre pays.
Zenit - Qui organise ces veillées ?
Le 14 juin 2010, le cardinal Antonio Cañizares Llovera, préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, et le cardinal Ennio Antonelli, président du Conseil pontifical pour la famille ont envoyé une lettre aux présidents des Conférences des évêques, du monde entier. Dans cette lettre, il est écrit : "Le Saint-Père désire que dans les Eglises particulières, les évêques président des cérémonies analogues, en y faisant participer les paroisses, les communautés religieuses, les associations et les mouvements. C’est pour cela qu’il nous charge de lancer cette invitation en son nom." Concrètement, les Veillées en France ont été "lancées" par des évêques, par des prêtres et des familles, de la base.
Zenit - Benoît XVI lui-même présidera une veillée à Saint-Pierre... c’est une première ?
Oui. Il l’a annoncé lui-même au terme de l’Angélus du dimanche 14 novembre en ces termes : "Samedi 27 novembre prochain, dans la Basilique de Saint-Pierre, je présiderai les Premières Vêpres du Premier dimanche de l’Avent et la veillée de prière pour la vie naissante. L’initiative est partagée avec les Églises particulières du monde et j’en ai recommandé le déroulement dans les paroisses, communautés religieuses, associations et mouvements. Le temps de préparation à Noël est un instant propice pour invoquer la protection divine sur chaque être humain appelé à l’existence, et aussi comme une action de grâce à Dieu pour le don de la vie reçu de nos parents."
Zenit - Pourquoi les Vêpres ?
Parce que c’est la prière de l’Eglise. Quelle joie de savoir que les Psaumes seront priés, chantés, sur les cinq continents, à cette intention. Quelle joie de laisser monter de nos cœurs sur nos lèvres, l’étincelant cantique du Magnificat ! Marie, femme, épouse, mère qui laisse jaillir ce cantique d’action de grâces pour la Vie ! Les Vêpres du 27 novembre ouvrent une nouvelle année liturgique. Dans le cœur du Saint-Père, comment ne pas voir l’ardent désir que s’ouvre pour l’humanité une nouvelle saison dans l’accueil de la vie depuis sa conception, jusqu’à son terme naturel.
Zenit - En France, le 27 novembre rappelle la visite de Marie à Paris à la Rue du Bac...
Pour nous, Français, quel bonheur que cette Veillée tombe le jour de la fête de Notre-Dame à la Médaille Miraculeuse à Paris ! C’est le 27 novembre 1830 que Sainte Catherine Labouré voit la Vierge avec dans ses mains un petit globe terrestre surmonté d’une Croix. La Sainte Vierge dit à Sœur Catherine : "Cette boule représente le monde entier, la France et chaque personne en particulier". Puis, la religieuse voit sortir des mains de la Vierge Marie des rayons de lumière : "Ces rayons sont le symbole des grâces que je répands sur les personnes qui me les demandent" dit la Vierge Marie. Ensuite, un ovale se forme autour de l’apparition. Sainte Catherine voit s’inscrire en demi-cercle cette invocation en lettres d’or : "O Marie conçue sans péché priez pour nous qui avons recours à vous". La Sainte Vierge demande alors à Sainte Catherine : "Faites, faites frapper une médaille sur ce modèle. Les personnes qui la porteront avec confiance recevront de grandes grâces". Enfin, le tableau se retourne et la jeune religieuse voit, au dos de la médaille une grande Croix, avec un grand M, M comme Marie. En bas se trouvent deux cœurs : l’un couronné d’épines, et l’autre transpercé d’un glaive. Se trouve illustrée dans cette médaille, toute l’Encyclique de Jean Paul II Evangelium Vitae. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi cette Veillée du 27 novembre est une grâce toute particulière pour la France Fille aînée de l’Eglise ! Saurons-nous la saisir ? Quelle responsabilité nous avons !
Zenit - Pourquoi une telle Veillée ?
Parce qu’il y a urgence. Urgence d’abord de la prière. Nous devons comprendre que rien ne changera en nous, dans nos familles, dans la société si d’abord nous ne nous tournons pas vers Dieu dans ce cri dont parle Jean Paul II dans Dives in Misericordia : Implorer Miséricorde pour notre temps. Nous savons bien, en relisant l’Histoire, ce que la prière a pu obtenir. Tout dernièrement, nous reconnaissons un miracle obtenu par la Vierge Marie le 7 octobre 2010, jour de la fête de Notre-Dame du Rosaire. Alors que l’objection de conscience devait être supprimée en Europe, non seulement le vote du 7 octobre a sauvegardé la clause de conscience, mais l’a renforcée au niveau européen. C’est une victoire de Marie. Tout n’est pas gagné, il reste encore bien des éléments sur cette question à faire respecter. Cependant, la prière nous fait sortir de notre égoïsme. La prière suscite une charité audacieuse et inventive, concrètement. La prière nous donne la force des doux pour nous engager au quotidien dans ce domaine. Oui, il y a urgence lorsque dans le monde 50 millions d’enfants sont avortés chaque année. Un avortement chaque minute et demie en France. C’est-à-dire qu’un enfant sur 4 conçu en France est avorté. Un avortement toutes les 11 secondes en Europe, un toutes les 3 secondes aux USA. La Veillée du 27 novembre, pour la vie naissante, est la première dans l’Histoire de l’Eglise. C’est dire combien nous devons veiller et prier ce 27 novembre. Nous avons une responsabilité devant Dieu et devant les générations présentes et à venir de notre prière ou de notre non-prière. Et pas seulement le 27 novembre.
Zenit - Avec cette Veillée, que désire Benoît XVI ?
Je ne suis pas dans le cœur du Pape. Cependant, en écoutant son enseignement, on peut dire ceci : Dieu a créé l’homme à son image et à sa ressemblance. L’invitant à participer à sa Gloire dans le Ciel. Nous sommes tous dépendant de cette paternité de Dieu. La mentalité du monde (hédonisme, contraception, avortement, euthanasie, non respect de la personne dans des recherches scientifiques, le divorce, le suicide...) nous pousse à nous affranchir de cette dépendance radicale que nous avons à l’égard de Dieu-Père. L’exercice de cette paternité de Dieu nous rend heureux, puisque nous y accueillons et reconnaissons sa Présence bienveillante en nous, sur nous, avec nous, pour notre salut. Nous sommes responsables les uns des autres. Aussi le Pape n’hésite pas à parler jeudi 18 novembre 2010 de ce qui "blesse la justice" dans les rapports les uns aux autres, en prenant l’exemple de : "la santé reproductive, avec le recours à des techniques artificielles de procréation comportant la destruction d’embryon", ou de "l’euthanasie légalisée" Caïn et Abel : nous sommes frères les uns envers les autres. Nous avons tous une responsabilité : Benoît XVI l’a souligné avec des paroles fortes et prophétiques lors de son homélie à Fatima : "Où est ton frère Abel ? (...) La voix du sang de ton frère crie de la terre vers moi !" (Gn 4, 9). L’homme a pu déclencher un cycle de mort et de terreur, mais il ne réussit pas à l’interrompre... À la famille humaine prête à sacrifier ses liens les plus saints sur l’autel de l’égoïsme mesquin de la nation, de la race, de l’idéologie, du groupe, de l’individu, notre Mère bénie est venue du Ciel pour mettre dans le cœur de ceux qui se recommandent à Elle, l’amour de Dieu qui brûle dans le sien." (Homélie du Pape à Fatima, le 13 mai 2010). C’est dans cette lumière de Fatima, me semble-t-il, qu’il faut recevoir et comprendre cette demande du Pape de la Veillée du 27 novembre.
Zenit - Benoît XVI est en continuité avec Jean Paul II ?
Pas seulement. Déjà le Pape Paul VI avec Humanae Vitae, le 25 juillet 1968, a frappé à la porte de la conscience en disant : "Stop ! Où allons-nous, où veut aller l’humanité ?". Avec Jean Paul II, à travers Evangelium Vitae, du 25 mars 1995, il y a l’amorce d’un réveil. Une mentalité nouvelle voit le jour ; Nous pouvons le constater depuis 15 ans partout dans le monde, même à travers les hostilités : quelque chose de profond se met en marche, partout. On voudrait que cela vienne plus vite, certes. Mais cela dépend aussi de notre engagement personnel. De son côté Benoît XVI ne cesse depuis 5 ans de frapper à la porte de l’intelligence du cœur de chaque homme, de chaque femme ; des responsables politiques, des Nations. Début novembre de cette année en Espagne, le Saint-Père a "averti l’Europe" sur cette question au cours de sa Visite Apostolique en parlant du respect de la vie humaine, de la famille fondée sur le mariage librement consenti par un homme et une femme ; comme aussi des techniques médicales appelées à respecter la personne humaine. Le Saint-Père vient une nouvelle fois de le dire jeudi 18 novembre, par rapport au "consumérisme médicamenteux". Même si le combat est bien présent, de belles pages d’Espérance s’écrivent au présent. Ce qui donne de nous tourner avec confiance vers l’avenir.
Zenit - Quelles sont les prochaines initiatives de "l’Evangile de la Vie" ?
Le Seigneur a permis que la Famille Missionnaire l’Évangile de la Vie soit fondée au lendemain de la publication de l’encyclique de Jean Paul II il y a 15 ans. Depuis ce temps, ancrés sur la prière eucharistique et mariale, nous sommes une petite présence pour susciter un nouveau printemps, pour qu’une génération de jeunes se lève. Je peux vous dire qu’elle se lève. Les jeunes demandent d’être formés et non formatés, d’être encouragés face au découragement ambiant. Pour cela, nous proposons des formations avec des aînés qui ouvrant leur cœur et leur intelligence de ce qu’ils ont appris, les préparent à prendre le relais. Nous avons lancé cette année une "Ecole des parents" afin de permettre aux parents de les aider dans leurs responsabilités d’éducateurs de leurs enfants. Des jeunes cheminant vers le mariage viennent vivre une retraite spirituelle. Nous proposons aussi un "service après vente" pour soutenir la famille fondée dans le Sacrement du Mariage. En fait, nous nous laissons conduire par la Sainte Vierge qui nous guide. En profonde communion avec notre archevêque, Monseigneur Cattenoz, qui m’a demandé de venir dans son diocèse d’Avignon, pour cette mission.
Zenit - Samedi 20 novembre, aura lieu dans votre maison de Bollène, un colloque sur l’Objection de conscience : c’est un thème important de l’enseignement social de l’Eglise. Dans quels domaines, l’objection de conscience a-t-elle le plus besoin d’être défendue aujourd’hui ?
C’est en premier lieu la conscience de chaque personne qui doit être formée et non formatée. Pour devenir des êtres libres et responsables de ses actes. Ensuite parce que nous sommes frères et sœurs en humanité, il y a certains actes que nous ne pouvons accepter, parce qu’ils vont contre la grammaire commune inscrite dans la conscience de chaque personne humaine : par exemple "Tu ne tueras pas", ou encore "Honore ton père et ta mère". Est vraiment humain ce qui ennoblit l’homme. Pour que la joie de cette alliance ne soit pas brisée par des actes, la conscience humaine peut et doit savoir dire non. C’est marquer un profond respect en 3D : pour Dieu, pour soi, pour les autres. La loi humaine ne peut en aucun cas se trouver au-dessus de la loi de Dieu. Le Pape l’a rappelé lors de son intervention au Parlement de Londres le 17 septembre 2010. Intervention applaudie pendant plusieurs minutes !
En Europe, l’objection de conscience a été maintenue et renforcée, nous devons nous en réjouir. Mais, pourquoi n’est-elle pas encore reconnue pour les pharmaciens, par exemple ? Et concrètement, il y a encore de gros efforts à faire pour qu’elle soit respectée et vécue au quotidien dans le milieu médical.
Zenit - Qu’aimeriez-vous ajouter ?
Avec Benoît XVI, des paroles prononcées à Fatima, qui ne cessent de résonner dans mon cœur :
"Qui veille, dans la nuit du doute ou de l’incertitude, avec le cœur éveillé en prière ? Qui attend l’aube du jour nouveau, tenant allumée la flamme de la foi ? La foi en Dieu ouvre à l’homme l’horizon d’une espérance certaine qui ne déçoit pas ; elle indique un fondement solide sur lequel appuyer, sans peur, toute son existence ; elle requiert l’abandon, plein de confiance, entre les mains de l’Amour qui soutient le monde."
Propos recueillis par Anita S. Bourdin
Source : Zenit.org
Liste des veillées pour toute vie naissante organisées dans notre diocèse