ENTREZ DANS MON REPOS !

16 juillet 2022

Chaque jour, dans la liturgie des Heures, le psaume 94 est le portail d’entrée pour la prière. Ce psaume est invitatoire : Venez, crions de joie pour le Seigneur ! Allons jusqu’à lui en rendant grâce, par nos hymnes de fête acclamons-le ! Après nous avoir invité à la louange, il nous appelle à l’adoration : Entrez, inclinez-vous, prosternez-vous, adorons le Seigneur qui nous a faits. Un peu plus loin, le psaume fait apparaître le choix que nous avons à faire chaque jour : aujourd’hui, écouterez-vous ma parole ?

Ecouter sa Parole, telle est l’attente de Dieu à notre égard ! Nous en avons tous fait l’expérience dans une conversation. Nous parlons, nous exposons notre point de vue avec ardeur et, à un moment, nous constatons que notre interlocuteur n’est plus là ! Il ne nous écoute plus ! Et cela, à juste titre, nous déçoit !

Alors que nous sommes le peuple qu’Il conduit, le troupeau guidé par sa main, les brebis dont il prend soin, nous voici parfois (et même souvent !) à faire la sourde oreille. Dieu va-t-il parler plus fort ? Va-t-il hausser le ton ?
Le psaume exprime sa déception tout comme Jésus qui pleure sur la ville de Jérusalem en lui disant : « tu passes à côté de la grâce de ta vie ! » ! si seulement, tu avais reconnu en ce jour ce qui donne la paix ! Lc 19, 42

Le dernier mot du psaume nous rappelle que le but de notre vie est d’entrer dans le repos de Dieu. L’expression « repos de Dieu » peut nous faire sourire ! En effet, Dieu tout puissant peut-il être fatigué comme nous le sommes après une dure journée de labeur ?

Quand nous lisons le 1er récit de la Création au 1er chapitre de la Genèse, l’action de Dieu est décrite par une Parole : « Faisons », suivie d’effet : « Et ce fut ainsi. » Après ces six « jours », il est indispensable de prêter attention jusqu’au bout : Le septième jour, Dieu avait achevé l’œuvre qu’il avait faite. Il se reposa, le septième jour, de toute l’œuvre qu’il avait faite. Gen 2, 2 Tel est le Sabbat, le repos de Dieu. Alors qu’il a mis toute la Création en forme, depuis la lumière jusqu’à l’homme, Dieu se retire :

« Dieu a créé l’homme comme la mer a fait les continents, en se retirant. » Friedrich Hölderlin

Dieu laisse ainsi à l’homme, créé libre, la possibilité d’une réponse : aujourd’hui, écouterez-vous ma parole ?

Telle est la noblesse de notre vocation d’homme : entrer dans l’Alliance à laquelle Dieu nous appelle, lui donner la réponse qu’il attend de nous.

Dieu ne manifeste pas sa puissance uniquement par la force et la gloire mais aussi dans sa capacité à retenir sa puissance et à se manifester dans la brise légère. Nous sommes appelés à imiter Dieu en respectant nos limites et en retenant à notre tour notre puissance : puissance économique, puissance du travail, puissance technologique… Car l’homme a bien été investi de puissance sur le monde, sur la nature qu’il doit travailler et soumettre. Mais Dieu la lui confie pour qu’il en soit le gardien, le conservateur… ce qui implique une retenue. Sans retenue, sans repos, sans limite, l’homme cherche à en faire toujours plus : il prétend fixer lui-même les règles du jeu. Il se donne droit de vie et de mort sur les autres. Et quand il a accompli quelque chose, il est tenté de faire de son œuvre une idole, c’est-à-dire se complaire dans ce qu’il a fabriqué et qu’il croit avoir créé.

Ainsi, à notre époque, pour le chrétien influencé par le monde, le repos est un défi et parfois un vrai combat !

Combat pour se retirer : certes, nous partons (pour ceux qui le peuvent) en vacances… mais pour rester branchés… ! Saurons-nous couper notre téléphone et faire silence sur les réseaux sociaux ? Sommes-nous conscients que nous nous laissons manger par les écrans ? Ne nous laissons pas voler le silence et le calme dont nous avons besoin !

Il y a un autre combat ! Pour se reposer, il faut d’abord se poser… s’arrêter… alors que nous nous sentons parfois obligés de faire le tour de France pour ‘voir tout le monde’.

Je prie donc pour que nous sachions vivre des vacances comme un temps de calme. Pour éviter le marathon, prenons le temps de réfléchir sur ce qui est juste vis-à-vis de nous-mêmes et de nos activités. Cherchons le silence et l’intériorité. Entrons dans le repos de Dieu.

Père Michel BERGER, curé