Méditations Carême 2023 : patience - douceur - simplicité

20 mars 2023

Carême 2023. Secteur paroissiale de Camaret

PATIENCE -DOUCEUR - SIMPLICITE

Patience.

Sur le chemin de la perfection, la vertu de patience est indispensable. Rien ne sert de courir car on se fatigue vite et on s’arrête en chemin. Une jeune novice, Mlle de Soulfour, avait un désir de perfection généreux, certes, mais brouillon, inquiet et très fougueux. Son désir d’absolu était inquiétant. Aussi François tente de l’éduquer en l’empêchant de s’égarer dans des illusions ou de capituler devant des échecs, mais tout en soutenant sa grande ferveur.

(1)« Maintenant, donc, prenez un peu haleine, respirez quelque peu, et, par la considération des dangers échappés, divertissez ceux qui pourraient advenir ci-après. Tenez pour suspects tous ces désirs qui, selon le commun sentiment des gens de bien, ne peuvent pas être suivis de leurs effets ; tels sont les désirs de certaine perfection chrétienne qui peut être imaginée mais non pas pratiquée, et de laquelle plusieurs font des leçons, mais nul n’en fait les actions. »

(2)« Sachez que la vertu de patience est celle qui nous assure le plus de la perfection, et s’il la faut avoir avec les autres, il faut aussi l’avoir avec soi-même. Ceux qui aspirent au pur amour de Dieu n’ont pas tant besoin de patience avec les autres comme avec eux-mêmes. Il faut souffrir notre propre imperfection pour avoir la perfection ; je dis souffrir avec patience et non pas aimer ou caresser : l’humilité se nourrit en cette souffrance. »

Madeleine de la Fléchères était, aux dires que St François, « une âme forte, un esprit raisonnable et une humilité parfaite ». Mais, n’aimant pas céder sur ses droits, elle était volontiers procédurière et dut, sur le chemin de la perfection, apprendre la patience.

(3)« Il n’est pas possible que vous soyez si tôt maîtresse de votre âme et que vous la teniez en votre main si absolument de premier abord. Contentez-vous de gagner de temps en temps quelque petit avantage sur votre passion ennemie. Il faut supporter les autres, mais premièrement soi-même et avoir patience d’être imparfait. Mon Dieu, ma chère Fille, voudrions-nous bien entrer au repos intérieur sans passer par les contradictions et contestes ordinaires ?  »

(4)« Observez bien les points que je vous ai dits. Préparez dès le matin votre âme à la tranquillité ; ayez un grand soin, le long du jour, de l’y appeler souvent et de la reprendre en votre main. S’il vous arrive quelque acte de chagrin, ne vous en épouvantez point, ne vous en mettez nullement en peine ; mais, l’ayant reconnu, humiliez-vous doucement devant Dieu et tachez de remettre votre esprit en posture de suavité. Dites à votre âme : Or sus, nous avons fait un faux-pas, allons maintenant tout bellement et prenons garde à nous. Et toutes les fois que vous retomberez, faites-en de même.  »

Même Jeanne de Chantal éprouvait souvent une impression de vide intérieur, une certaine impuissance spirituelle, et était même tentée de tout abandonner.

(5)« Je loue Dieu, lui écrit François, de la constance avec laquelle vous supportez vos tribulations. J’y vois néanmoins encore quelque peu d’inquiétude et d’empressement qui empêche le dernier effet de votre patience. En votre patience, dit le Fils de Dieu, vous possèderez vos âmes. C’est donc l’effet de la patience de bien posséder son âme, et à mesure que la patience est parfaite, la possession de l’âme se rend plus entière et excellente. Or la patience est d’autant plus parfaite qu’elle est moins mêlée d’inquiétude et d’empressement. Dieu donc vous veuille délivrer de ces deux dernières incommodités et sitôt après vous serez délivrée de l’autre. »

Et pourtant Jeanne de Chantal a été sanctifiée. Prions-la pour qu’elle nous aide à dépasser nos découragements.

 

La douceur

La douceur, pour François de Sales, est jumelée avec l’humilité.

« La douceur et l’humilité sont les bases de la sainteté », écrit-il à J. de Chantal. Cette douceur, il la demande aussi pour Mme de Peyzieu, une dame veuve, maman de cinq enfants.

(6)« ...Je vous approcherai souvent en esprit pour, avec vous conjointement, demander à Notre Seigneur qu’il lui plaise de consoler votre âme de sa bénédiction, la faisant abonder en son saint amour et en la sacrée humilité et douceur de coeur, qui ne sont jamais sans ce saint amour, non plus que le saint amour sans elles. »

Mme Bourgeois était abbesse de l’Abbaye Royale du Puits d’Orbe et voulait la réformer, car la règle était un peu relâchée. Elle procédait de façon un peu rigide et les résultats se faisaient attendre. Elle s’en est ouverte à St François qui lui conseille, avant de réformer l’abbaye, de se réformer elle-même.

(7)« Mais tenez la méthode que je vous ai dite de commencer par l’exemple ; et bien qu’il vous semblera profiter peu au commencement, ayez néanmoins de la patience, et vous verrez ce que Dieu fera. Je vous recommande surtout l’esprit de douceur qui est celui qui ravit les coeurs et gagne les âmes. Tenez bon et ferme en ce commencement à bien faire tous vos exercices, et préparez-vous dans la douceur aux tentations et contradictions ; car le malin esprit vous en suscitera infiniment pour empêcher le bien qu’il prévoit devoir sortir de votre résolution. »

Cette douceur, il la prêche aussi à Jeanne-Charlotte de Bréchard choisie pour fonder le Monastère de la Visitation de Moulins.

(8)« Qui peut conserver la douceur parmi les douleurs et les langourissements, et la paix entre les tracas et la multiplicité des affaires, il est presque parfait, et bien qu’il se trouve peu de gens, dans les Religions même, qui aient atteint à ce degré de bonheur, néanmoins il y en a pourtant et il y en a eu de tout temps, et il faut aspirer à ce haut point. »

La douceur est aussi importante dans la vie en famille, afin de conserver l’harmonie indispensable, ainsi qu’il l’écrit à Mme de la Fléchères :

(9)« Faites avec un soin particulier tout ce que vous pourrez pour acquérir la douceur envers les vôtres, je veux dire en votre ménage. Je ne dis pas qu’il faille être molle ni remise, mais je dis douce et suave. Il faut’y penser en entrant en la maison, en sortant d’icelle, y étant le matin, à midi, à toute heure. »

La douceur est aussi nécessaire avec toutes nos relations, avec les personnes que l’on fréquente ou que l’on rencontre. A la sœur de la Mère Angélique, il conseille

(10)« Parsemez toutes les pièces de vos relations, tant intérieures qu’extérieures, de sincérité, douceur et allégresse. »

(11)« La douceur exige abnégation et amour de Dieu. Je ne doute point qu’il ne se passe des aversions et répugnances dans votre esprit ; mais ce sont autant d’occasions d’exercer la vraie vertu de douceur, car il faut faire bien, et saintement, et amoureusement ce que nous devons à un chacun, quoique ce soit à contrecœur et sans goût.  »

 

La simplicité.

« La vraie simplicité est toujours bonne et agréable à Dieu », a écrit St François à une de ses dirigées. Et pourtant il reconnaît que lui-même en manque, ainsi qu’il l’écrit à Jeanne de Chantal :

(12)« Non, de vrai, je ne suis nullement simple ; mais j’aime si extrêmement la simplicité que c’est merveille. A la vérité dire, les pauvres et blanches colombelles sont bien plus -agréables que les serpents ; et quand il faut joindre les qualités de l’un à celles des autres, pour moi je ne voudrais nullement donner la simplicité de la colombe au serpent car le serpent ne laisserait pas d’être serpent ; mais je voudrais donner la prudence du serpent à la colombe, car elle ne laisserait pas d’être belle. »

Dans nos conversations, il est souvent difficile de parler de soi en restant simple. Alors, quelquefois, il vaut mieux ne rien dire, comme l’explique François à l’une de ses correspondantes

(13)« Sans doute, qui parle peu de soi-même fait extrêmement bien ; Car que nous en parlions en nous accusant, soit en nous excusant, soit en nous louant, soit en nous méprisant, nous verrons que toujours notre parole sert d’amorce à la vanité. Si donc quelque grande charité ne nous attire à parler de nous et de nos appartenances, nous nous en devons taire.  » 

Mais alors, devra-t-on garder le silence de peur de s’attirer des louanges ou dans la crainte d’être hypocrite, parce qu’on n’agit pas si bien que l’on parle ? A cette question que lui pose l’un de ses correspondants, François répond :

(14)« Il ne faut rien faire ni rien dire pour en être loué, ni laisser aussi de rien faire ou rien dire de crainte d’être loué. Et ce n’est pas être hypocrite de ne faire pas si bien que l’on parle, car, Seigneur Dieu ! à quoi en serions-nous ? Il faudrait donc que je me tusse de peur d’être hypocrite, puisque, si je parlais de la perfection, il s’ensuivrait que je penserais être parfait. Non certes je ne pense pas être parfait parlant de la perfection, non plus que je ne pense pas être italien parlant italien ; mais je pense savoir le langage de la perfection, l’ayant appris de ceux avec qui j’ai conversé qui le parlaient.  »

Mlle de Soulfour, qui était très désireuse de perfection, mais avait un esprit brouillon et inquiet avait un trop grand désir d’absolu. François essaie de la calmer, et lui demande d’être moins compliquée.

(15)« Si votre oeil est simple, tout votre corps le sera, dit le Sauveur. Simplifiez votre jugement, ne faites point de réflexions ni de répliques. Mais allez simplement et avec confiance. »

D’ailleurs le Seigneur ne nous demande pas autre chose pour lui être agréable. C’est pourquoi St François ajoute :

(16)« C’est une grande et parfaite simplicité de n’arrêter volontairement son esprit qu’en Dieu seul. Notre Seigneur vous veut en cette manière de si parfaite simplicité ; très assurément c’est ce que vous pouvez faire de plus agréable à sa bonté. Demeurez là et n’en sortez jamais, sinon pour voir et faire ce qu’il commande pour son service ; puis retirez-vous incontinent en lui, en cette simplicité qui comprend tout. »

 

La volonté de Dieu.

Toutes les vertus salésiennes n’ont qu’une seule origine, un seul moteur, c’est l’obéissance à la volonté de Dieu qui est la manifestation de notre amour pour lui. François de Sales s’applique à nous montrer comment dieu nous indique sa volonté ; il s’adresse à Mme Brûlard, une femme « du monde » qui doit vivre sa foi dans le monde.

(17)« Il faut avant toutes choses observer les commandements de Dieu et de l’Église qui sont établis pour tout fidèle chrétien et sans cela il ne peut y avoir aucune dévotion au monde : cela chacun le sait. Outre les commandements généraux, il faut soigneusement observer les commandements particuliers que chacun a pour ce qui regarde sa vocation.  »

Ce n’est pas la volonté de Dieu qui se calque sur la nôtre, mais notre propre volonté qui doit se calquer sur celle de Dieu. C’est ce qu’il écrit au duc de Bellegarde.

(18)« N’aimez point, s’il se peut, la volonté de Dieu parce qu’elle est selon la vôtre ; mais aimez la vôtre quand et parce qu’elle sera selon celle de Dieu. »

Nos prétentions et nos désirs ne sont pas toujours ceux de Dieu. Lui seul sait ce qui nous convient, c’est pourquoi nous avons l’impression de ne pas être toujours bien exaucés.

(19)« Plusieurs personnes demandent conseil à Dieu pour diverses choses ; il répond à tous par une seule réponse et tout à coup, par parole ouverte et claire ; mais ils ne l’entendent pas toujours bien qu’Il ait parlé clairement, car ils s’adressent à lui pour lui demander conseil de ce qu’ils veulent, et ils n’ont pas toujours ce qu’ils demandent. »